COP21 quels résultats attendre ?

Une négociation sur le climat à Paris : quels résultats attendre ?

L’effet de serre maintient la planète un niveau de température vivable,

La planète Terre bénéficie d’un climat favorable à la vie : une large partie de l’eau y est liquide et les variations de température ne connaissent pas les extrêmes des autres planètes. Cela est dû à l’effet de serre. Le rayonnement solaire traverse l’atmosphère et vient réchauffer les sols et l’océan. Ceux-ci à leur tour rayonnent de la chaleur qui va être absorbée en partie par les gaz de l’atmosphère. La vapeur d’eau joue un rôle essentiel dans cette absorption. Et la terre se réchauffe en moyenne de 18° C.

mais l’activité humaine (anthropique) modifie l’équilibre.

Si on change la composition de l’atmosphère, les phénomènes de captation de la chaleur rayonnée par la terre vont être modifiés. C’est ce qui se passe si les concentrations de dioxyde de carbone, CO2, de méthane, CH4, de protoxyde d’azote, N2O, sont changées. Ces gaz sont les principaux gaz à effet de serre. Les activités humaines telles que l’usage des combustibles fossiles, certains procédés comme la fabrication du ciment, la déforestation et la modification de l’usage des sols, l’usage d’engrais azotés modifient justement les concentrations dans l’atmosphère de ces gaz. Avec les concentrations atteintes aujourd’hui, l’augmentation de température en moyenne est estimée à 0,5° C

Il nous reste peu de temps pour une action vigoureuse.

Avec le niveau de concentration actuelle de ces gaz, l’évolution de température n’est pas terminée car les gaz restant longtemps dans l’atmosphère, plusieurs centaines d’années pour le dioxyde de carbone, continuent d’accumuler de la chaleur. De plus, nous continuons d’émettre des gaz à effet de serre, de manière croissante ce qui amplifie l’accumulation de chaleur.

Concentrons-nous sur le dioxyde de carbone qui représente 75% de l’effet de réchauffement. Sur les 20 dernières années, depuis que la convention climat est en œuvre, les émissions ont augmentées de 70%. Heureusement, tout ne reste pas dans l’atmosphère. Une part est reprise par les végétaux pour approximativement 30%. Une autre part est absorbée par les océans, 25%. Mais cela augmente l’acidité des océans ce qui a un effet néfaste sur le développement de la faune et de la flore océanique en modifiant notamment les conditions de fabrication des coquilles calcaires du plancton donc leur développement. Finalement, il reste plus de 40 % de dioxyde de carbone émis dans l’atmosphère. Au total, la capacité de l’atmosphère à s’échauffer a quasiment doublé depuis 1980.

Bien sûr, la terre au cours de son histoire a connu des périodes d’échauffement et de glaciation importantes. La faune et la flore, la répartition du genre humain se sont alors adaptés. Mais deux paramètres différents sont à l’œuvre aujourd’hui :

-l’évolution actuelle se fait à un rythme sans aucune mesure avec ce qui s’était passé alors sur des milliers d’années : cela limite la capacité d’adaptation de la faune et de la flore ;

– l’importance de la population humaine et la complexité de son organisation ne permettent pas d’imaginer de grandes migrations à l’instar de ce qu’avaient fait les populations de chasseurs-cueilleurs dans un monde ouvert.

Il est donc nécessaire de limiter les émissions de gaz à effet de serre. En termes d’augmentation de températures une limite maximale de 2° C a fait l’objet d’un consensus. Au-delà de celle-ci, des phénomènes pourraient se produire mettant en cause la possibilité d’une stabilisation de l’échauffement et d’une adaptation aux conséquences du changement de température.

Au rythme des émissions actuelles, dans 30 ans nous aurons atteint le niveau de dioxyde de carbone dans l’atmosphère correspondant à cette limite : il faudrait alors cesser immédiatement toute émission. Cette évaluation nous donne à la fois une échelle de temps, et un objectif en termes de transformation de l’activité de nos sociétés qui fonctionnent essentiellement aujourd’hui avec des énergies carbonées.

Tous les états doivent être impliqués dans une action équitable.

Il y a 50 ans, plus de 80% des émissions de dioxyde de carbone étaient dues aux économies développées d’Europe et d’Amérique. Aujourd’hui, la Chine globalement est le premier émetteur avec plus de 25%, devançant largement les États-Unis, 14%, ou l’Union Européenne, 9,5%.

Mais si on examine les émissions par habitant, les États-Unis se trouvent largement en tête avec 16,4 t CO2/habitant, suivi de la Chine avec un peu plus de 7 t CO2/habitant, puis l’Union Européenne, 6,8 t CO2/habitant. Notons que l’Inde se situe à 1,9 t CO2/habitant.

En se souvenant que le dioxyde de carbone reste plusieurs centaines d’années dans l’atmosphère, on peut faire apparaître une responsabilité historique dans les concentrations actuelles de dioxyde de carbone dans l’atmosphère. En prenant ce critère, les États-Unis sont responsables de 26 %, l’union européenne de 23 %, mais la Chine déjà de 11 %.

Alors, en soulignant que la qualité de notre atmosphère est une responsabilité commune de tous les états mais différenciée à raison des émissions et des capacités à agir, comment construire un accord équitable ?

Il est important ici de rappeler le rôle joué par l’énergie dans le modèle de développement des économies occidentales. Les pays en développement demandent aujourd’hui de bénéficier de ressources énergétiques similaires pour permettre leur propre développement, c’est-à-dire en se référant au modèle de développement des économies occidentales, et demandent la possibilité d’augmenter de manière significative leurs émissions.

Cependant, l’objectif étant de stabiliser le contenu en gaz à effet de serre de l’atmosphère, les émissions de dioxyde de carbone doivent être nulles à une échéance relativement proche. Il ne suffit donc pas que les économies développées réduisent leurs émissions pour permettre le développement des autres pays, il faut mettre en place progressivement dans tous les pays un modèle de développement sans émission de dioxyde de carbone, et plus largement de gaz à effet de serre.

L’équilibre complexe d’un accord pourra-t-il être atteint à Paris ?

L’accord attendu à Paris devrait être l’aboutissement d’une très longue négociation qui a permis d’intégrer tous les états dans un effort pour un objectif commun. L’équilibre d’équité n’est cependant pas considéré comme atteint par tous. De quoi est-il fait ?

Tout d’abord, chaque État définit l’effort qu’il fournira en regard de sa trajectoire de développement : pour les économies développées cela correspond à une réduction nette à l’horizon 2030, pour les économies moins développées cela correspond à une réduction des émissions par rapport à leurs trajectoires de développement attendu. Il est demandé aux économies développées de contribuer financièrement à l’effort des pays en développement.

La constitution du fonds vert pour le climat, à hauteur de 100 milliards US$ par an en 2020, progresse et des pays émergeants ont décidé d’y contribuer. L’OCDE évaluait « l’aide climatique » à 60 milliards approximativement en 2013. Les pays en développement souhaitent cependant avoir des garanties au moment de ratifier l’accord d’autant que fonds verts doit comptabiliser toutes les sources additionnelle de financement, publics ou privées.

Un autre point essentiel est la confiance dans l’engagement de chacun. L’accord de Paris demande que ces engagements soient transparents et leurs réalisations vérifiables. Une révision en fonction des progrès accomplis tous les 5 ans doit permettre effectivement la mise en place d’une dynamique concrète de réduction des émissions. Cela s’applique aux pays en développement tout comme aux pays développés.

Le dernier point qui fait débat est le caractère contraignant de l’accord : les états signataires sont-ils réellement engagés ? Il y a là des aspects juridiques et constitutionnels subtils que reflètent les positions prisent par les états. Si l’accord de Paris ne peut pas conclure à une obligation de résultat, il semble au moins nécessaire que le processus de vérification et de revue des engagements soit l’obligation minimale pour créer une dynamique, et que cet accord ne soit pas une simple déclaration.

Nous avons là quelques éléments clés pour examiner le succès de la réunion de Paris, c’est-à-dire si elle arrive à mettre en place un processus équitable et effectif pour la stabilisation du climat. L’analyse rapide qui vient d’être faite montre aussi qu’une mise en œuvre effective nécessite l’engagement de tous au-delà des gouvernements : collectivités locales, industries et entreprises, consommateurs et citoyens, car responsables concrètement des émissions de gaz à effet de serre.

Quelques références :

Synthèse du 5ème rapport du GIEC, 2015 ici. (en attente du texte en français)

Carbon budget 2014. The Global Carbon Project, 2014.

Climate Finance in 2013-14 and the USD 100 billion goal. OECD in collaboration with Climate Policy Initiative. 2015.

Pour une revue sur les processus de la convention climat.
1er lien ici.

2e lien ici

Par Marc Darras