Ethique, environnement, science et croissance

Dénouer les liens idéologiques entre éthique, environnement, science et croissance

En matière d’environnement, la période récente est riche de « mots valises » qui, s’ils font le bonheur des discours de nos hommes politiques, s’usent vite et doivent être régulièrement renouvelés. Après avoir préconisé le développement durable il est devenu de bon ton de promouvoir l’économie verte ; aujourd’hui la transition écologique, la transition énergétique, l’économie circulaire sont devenus le passage obligé du discours public, après l’agriculture raisonnée, la mode est devenue de parler d’agro-écologie, puis de l’agriculture écologiquement intensive. Derrière ces poncifs de langage, chacun voit bien que les responsables politiques continuent à regarder notre avenir à la recherche d’une croissance perdue, avec les lunettes du passé des « 30 glorieuses ». Les contradictions entre les préoccupations environnementales qui nous conduisent à réfléchir sur les conséquences de nos actions sur le temps long et les pressions de la crise économique qui nous conduisent à privilégier systématiquement des solutions de court terme ne cessent aujourd’hui de s’exacerber. Une lecture historique des modifications profondes de l’évolution de nos rapports avec l’éthique, l’environnement et la science permet de mieux éclairer pourquoi les recettes d’hier se révèlent inopérantes aujourd’hui.

Cet article est une reprise d’un document écrit par Jean-Luc Redaud dans le cadre de l’ « Académie de l’eau ».
Ingénieur Général honoraire des Ponts, des Eaux et des Forêts, Jean Luc Redaud a mené l’essentiel de sa carrière dans le monde de l’eau : Ancien Directeur de l’Agence de l’eau Adour-Garonne, il est Président du groupe Eau-climat du Partenariat Français pour l’eau et membre de l’Académie de l’eau.

La place de l’homme face à l’environnement

On peut observer que notre rapport à l’environnement a beaucoup changé notre perception de la place de l’homme dans l’univers.
Jusqu’au début du 20ème siècle, la thèse dominante est restée que l’homme et la nature étaient deux ensembles distincts : les alea de la nature étaient le fait de la contingence, le rôle de l’homme était de travailler en exploitant la terre mise à sa disposition. C’est cette vision sur laquelle a été fondée l’évolution de la période récente, notamment la confiance dans le génie créateur de l’homme, illustré par les grands progrès techniques du 19 ème et 2O ème siècles. Bien avant que les premiers écologistes aient commencé à étudier les liens qui relient les espèces vivantes à leur environnement, la place de l’homme dans l’univers a été un sujet de réflexions depuis longtemps pour les philosophes. Pour Descartes, l’homme est là pour acquérir maîtrise et possession de la nature … et à défaut il lui faut changer l’ordre de ses désirs plutôt que l’ordre du monde, tandis que Spinoza faisait observer que l’homme, dans la nature, n’est pas comme un empire dans un empire … et que notre libre arbitre n’est que l’ignorance des causes qui nous font agir.

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