COP21/Les Etats donnent le ton

Ce 30 novembre, dans une succession de discours, aussi divers qu’il y a de pays, tous les Etats ont répété ce même appel. Ce rendez-vous ne peut pas être une conférence comme les autres, il doit être fondateur d’un nouvel accord qui concerne tous les pays. Tous doivent s’inscrire dans cet objectif de deux degrés maximum de réchauffement pour ce siècle, voire 1,5°C comme l’a rappelé François Hollande dans son allocution d’introduction.

L’ambition politique est d’abord celle d’un consensus à trouver sur l’essentiel. Les atermoiements trop communs au processus des négociations, les rythmes poussifs, sont à évacuer. Voilà plus ou moins comment les chefs d’Etat ont regardé en face, les trop petits pas accomplis ces dernières années.

« Une conférence de la vie, un rassemblement de chefs d’Etat comme jamais connu pour une COP… un signe d’espoir, la solidarité beaucoup plus forte que la barbarie » martelait la présidence française. Cette tonalité aussi a trouvé un écho parmi les orateurs. Le climat n’est pas un sujet seulement environnemental : il est déterminant pour la stabilité des pays, il est reconnu comme un facteur aggravant des crises dans des régions fragiles.

Les formules n’ont pas manqué de panache quant à l’urgence, quant à a prise de conscience, quant à la nécessaire solidarité vis-à-vis des pays les plus vulnérables.

« Nous sommes à une croisée des chemins : nous avons décidé enfin de sauver notre planète … je suis conscient que nous sommes à la source de ce problème », a déclaré le président américain lors son allocution au Bourget.

Angela Merkel renchérit : « Un objectif juste, signifie que nous devons jouer un rôle de chef de file, les dégats découlent d’une responsabilité qui nous incombent et nous devons participer à ce que les pays en développement parviennent à leur objectif avec des lignes budgétaires nécessaires.

Une réponse anticipée à l’interpellation de l’Inde sur le devoir des Etats industrialisés ? car il s’agit bien d’un accord universel mais différencié à trouver… qui puisse répondre à temps à l’alarme des petits Etas insulaires « nous avons besoin d’aide », prononçaient de manière très émouvante les Iles Marshall.

« Longtemps nous avons retardé le moment de la conscience et joué avec les hypothèses qui ont servi de faux fuyants… il faut mettre en cohérence les discours et les actes » a-t-on entendu du Maroc, hôte de la prochaine COP 22.

Cette musique qui s’est répétée est bien celle de l’urgence et de la justice climatique ; elle peut être aussi importante que le fond. Elle densifie le démarrage des négociations, charge aux délégations de d’y arriver.

Car les compromis difficiles demeurent :

La nature de la contrainte de l’accord. La France, facilitatrice, a bien posé les trois options : un nouveau protocole, un texte de nature juridique, un texte avec des composantes ayant force contraignante. Les Etats qui pèsent lourd dans la négociation se sont davantage prononcés pour cette troisième option.

Les capacités pour les pays en développement pour amorcer une transition énergétique, alliant développement, accès à l’énergie propre et adaptation. L’un des enjeux est celui des financements, autant les montants (les 100 milliards annoncés depuis 2009, y sont presque) que la transparence (qui donne et pour quoi) et l’accès (un accord inclusive signifie ne laisser aucun pays de côté). Un autre enjeu est celui des transferts des technologies, voire des propriétés intellectuelles pour l’Inde. Enfin le mécanisme de révision des ambitions tous les cinq ans, au cœur de nombreuses attentions. Il sera l’un des critères de réussite de cette négociation.

Rien d’écrit donc, les pronostics seraient bien difficiles. D’autant que les allocutions ont autant concerné le texte que le processus : la mise en mouvement des acteurs, les stratégies et plans d’actions nationaux, les initiatives multi-acteurs qui vont être annoncés. Chacun a évoqué les transitions en cours dans son pays, l’influence sans doute de l’exercice imposé à tous des contributions. 184 rendus à ce jour, qui comptent pour plus de 95% des émissions mondiales. Et une trajectoire avoisinant les 3 degrés. On comprend d’autant plus la nécessité de réviser les objectifs nationaux, d’inclure d’autres dynamiques : lancement de l’alliance solaire internationale avec l’Inde en chef de file, 130 pays et entreprises ; une déclaration pour la R&D…

Une absence néanmoins… personne n’aura répondu au secrétariat général, qui fut le seul à parler des mobilisations des citoyens. « Il y a eu de nombreuses marches, signaux… j’espère que vous ne resterez pas sourds aux demandes de vos citoyens », mais les discours n’en ont pas parlé.

La présidence française prévoit un premier projet d’accord d’ici samedi 5 décembre. Laurent Fabius rencontrerait alors les Ministre et chefs de délégation sur les ultimes points politiques.